Cours Just People (2) : la justice, une question relationnelle

vendredi 05 avril 2024

La deuxième rencontre du cours « Just People » a été consacrée à la justice, selon la Bible. Le théologien Michaël Gonin a montré comment la justice n’est pas qu’une question juridique. Elle est également un engagement en faveur des humains et de la nature.

« Dans la Bible, le concept de justice n’est pas premièrement juridique. C'est avant tout un terme relationnel. C'est un type de relation où chacun se sent bien, où chacun est intégré », souligne Miahaël Gonin, professeur en éthique à la Haute école de théologie (HET-PRO) de Saint-Légier. Le 20 mars 2024, le théologien et docteur en éthique des affaires était l’invité de la deuxième rencontre du cours « Just People », organisée par StopPauvreté, le Réseau évangélique suisse, Interaction et le FREE COLLEGE.

« Recherchez d'abord le royaume et la justice de Dieu » (Mt 6.33), commande Jésus dans le Sermon sur la montagne. Cette parole se trouve au milieu d’un ensemble d’enseignements à propos d'argent, de confiance en Dieu, de divorce, d'adultère, de réconciliation, d'amour des ennemis, d'engagement, de foi sans compromis... Le thème de la justice, omniprésent dans la Bible, est donc bien plus large qu’une simple interdiction de faire le mal.

Durant son ministère terrestre, Jésus a mis la justice au cœur de son enseignement et de son action : « L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a consacré par onction pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres ; il m'a envoyé pour guérir ceux qui ont le cœur brisé, pour proclamer aux prisonniers la délivrance et aux aveugles le recouvrement de la vue, pour renvoyer libres les opprimés, pour proclamer une année de grâce du Seigneur » (Lc 4.18-19).

Une justice qui se voit

Cette parole de Jésus est, en fait, une citation du prophète Ésaïe à propos du salut offert par Dieu aux croyants. Plus loin, le texte continue ainsi : « On les appellera alors ‘térébinthes de la justice’, ‘plantation de l’Eternel destinée à manifester sa splendeur’ » (És 61.3). « Un térébinthe de la justice, c'est quelque chose qui se voit, fait remarquer Michaël Gonin. Ce sont des gens malades qui sont guéris, des pauvres qui sont libérés, des prisonniers dont on prend soin. »

La justice, selon la Bible, ne se limite pas à un système juridique. Elle inclut l’établissement et le maintien de conditions favorables à la vie : la paix, la libération, la rédemption, le salut, la grâce, la liberté. Dans notre société, elle se présente de plusieurs manières : justice spirituelle, justice matérielle, justice sociale, justice économique, justice légale et pénale, refus de l’oppression, protection de l'environnement, politique, santé, équité, accès au savoir et à la vérité, possibilité d’être utile à la société, accueil des étrangers, possibilité de répondre à l’appel de Dieu, etc. Être juste, ce n’est pas simplement donner une pièce à un mendiant. Cela implique une réflexion et une action à propos de la manière d’intégrer ce mendiant dans notre communauté, afin qu'il se sente à sa place.

Le rôle d’Israël – puis de l’Église – est de pratiquer cette justice, de montrer ainsi le cœur de Dieu, afin de devenir un modèle qui interpelle et fait envie aux autres peuples. « Lorsque nous lisons l’ensemble de la Bible, nous constatons que la justice, l’amour et la bonté sont inséparables, souligne Michaël Gonin. Nous ne supportons pas que les gens que nous aimons subissent des injustices. Pour Dieu, c'est la même chose. Parce qu'il aime les gens, il désire la justice pour eux. Et quand une personne sur terre subit une injustice, cela met Dieu en colère. »

Lorsque nous sommes chrétienne ou chrétien, la justice devient donc un style de vie, une passion du Saint-Esprit en nous. C'est ce qui permet à Paul d’écrire aux chrétiens de Rome : « À présent, affranchis du péché, vous êtes devenus esclaves de la justice » (Ro 6.18). Cette passion pour la justice interdit de se contenter du minimum. Jésus critique les responsables religieux qui pratiquent la justice comme une « check-liste », veillant individuellement à ne pas faire de faute : « Si votre justice ne dépasse pas celle des spécialistes de la loi et des pharisiens, vous n'entrerez pas dans le royaume des cieux » (Mt 5.20).

Une justice en réponse à la justification

Cette justice pratiquée de manière active ressemble-t-elle à une forme de légalisme, de retour au salut par les œuvres ? Les chrétiennes et les chrétiens ne sont-ils pas justes en raison de leur justification par la foi ? Michaël Gonin propose de ne pas opposer la justification par la foi et la justice mise en pratique : « Grâce à l’œuvre du Christ, Dieu nous donne gratuitement sa justice. Nous sommes donc justes ! Mais, être quelqu'un de juste, ça devrait ensuite se voir grâce à des actions, non pas pour prouver quoi que ce soit, mais justement parce que nous sommes justes ».

Si nous sommes devenus « esclaves de la justice » (Ro 6.18), cela signifie que nous laissons le Saint-Esprit de justice et de vérité parler en nous. La justice ne peut être qu’une motivation fondamentale dans la vie chrétienne, une passion, un engagement, une consécration.

« Pour moi, l’évangélisation – l'annonce de la Bonne Nouvelle – passe par l'annonce qu'il y a un Dieu juste qui aime les gens, souligne Michaël Gonin. J'ai envie de montrer à ces gens ce Dieu juste, comme j'ai envie de leur montrer que Dieu les aime. La justice fait partie aussi de l'évangélisation, tout comme la prière pour les malades. »

Il faut aussi souligner que le thème de la justice est lié à celui de l’écologie et du climat. Ainsi, l’alliance de Dieu avec Noé est plus qu’une alliance avec les humains. Dieu s'intéresse aussi au monde animal et au monde végétal qui font partie de sa création : « J'établis mon alliance avec vous et avec votre descendance après vous, avec tous les êtres vivants qui sont avec vous, tant les oiseaux que le bétail et tous les animaux de la terre, avec tous ceux qui sont sortis de l'arche, avec tous les animaux de la terre » (Ge 9.9-10).

Dieu se préoccupe de la nature

Ce souci de Dieu pour la nature est confirmé par Jésus : « Ne vend-on pas deux moineaux pour une petite pièce ? Cependant, pas un ne tombe par terre sans l’accord de votre Père. Même vos cheveux sont tous comptés. N’ayez donc pas peur : vous valez plus que beaucoup de moineaux » (Mt 10.29-31). L’affirmation principale est que Dieu prend soin de nous. Mais l’exemple montre qu’il s’occupe également de la nature dont il est le Créateur.

Et cette affirmation rejoint celle de l’apôtre Paul qui présente un projet de réconciliation de toute la création autour du Christ : « Le Fils est l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création. En effet, c’est en lui que tout a été créé dans le ciel et sur la terre, le visible et l’invisible, trônes, souverainetés, dominations, autorités. Tout a été créé par lui et pour lui » (Col 1.15-16). Ainsi, le rachat des croyants n’est pas tout. Il est accompagné d’une réconciliation beaucoup plus large.

« Voir Jésus comme son Sauveur personnel est parfaitement juste, souligne Michaël Gonin. Mais si nous nous arrêtons là, alors nous avons tout faux ! En effet, Jésus n'est pas juste mon pote qui marche à mes côtés pour m’aider quand j’ai un problème. Non ! Il est le Seigneur de l'univers, de toute la création. » Dieu nous appelle à élargir notre vision du salut et de la réconciliation, à prendre des responsabilités. Nous sommes incapables de sauver la planète. Cependant, Dieu nous confie des responsabilités.

L’Église face aux effondrements

Selon beaucoup de scientifiques, la crise climatique et énergétique va provoquer des effondrements au sein de notre société. Beaucoup de gens se demandent : « Comment cela va-t-il finir ? » Pour Michaël Gonin, la bonne question à se poser est plutôt : « Qu'est-ce que Dieu me demande de vivre aujourd'hui ? Comment me demande-t-il d'apprendre à voir le monde autour de moi ? » Il s’agit de contempler l’œuvre du Créateur, de chercher le Royaume de Dieu et sa justice et de savoir que les choses de ce monde passent.

« Cela ne devrait pas nous surprendre si notre civilisation s’écroule, précise Michaël Gonin. L’histoire de l’humanité est faite de civilisations qui montent et qui tombent. Pourquoi cela serait-il différent aujourd'hui ? Il est plus important de se souvenir que Dieu règne et que la civilisation qui compte, c'est l’Église. Celle-ci peut amener une différence et une espérance. » Dans ce but, il est important que nous soyons pleinement l’Église, notamment en écoutant sérieusement le Christ nous dire : « Recherchez d'abord le royaume et la justice de Dieu » (Mt 6.33).

 

Présentation de cette rencontre sur le site du FREE COLLEGE.

Vidéo de la soirée, sur LafreeTV.

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