Il y a trois ans, Marius se rend six mois en vacances en Thaïlande avec son colocataire. Là-bas, «à la recherche de quelque chose de plus», il intègre, pendant dix jours, un temple qui organise des stages d'enseignement de la religion bouddhiste. Aujourd'hui, à 24 ans, Marius s'en est remis mais cela lui a pris un an pour surmonter le trouble de son passage là-bas. Qu'est-ce qui a bien pu s'y passer ?
Rembobinage
Malgré cet attrait, apparu à l'adolescence, pour les religions orientales et l'ésotérisme, Marius a toujours «cru en Dieu», ou tout du moins en un être supérieur. Il avait entendu parler de Dieu au catéchisme. «J'ai toujours effectué des sortes de prières, où je parlais à quelqu'un, Dieu en quelque sorte. Mais je ne savais pas bien à qui je m'adressais». Au sein de cette relation informelle avec Dieu, Marius s'est toujours «senti protégé et guidé.» «Mais j'avais une fausse image de lui, je pensais que l'enfer n'existait pas, que tout le monde irait au paradis et que toutes les religions menaient à Dieu...»
Entre 15 et 20 ans, Marius s'interroge beaucoup sur la spiritualité et se renseigne au sujet de phénomènes ésotériques, notamment les sorties hors du corps, en lisant des « bouquins » ou en allant visiter des personnes qui manient les énergies. Mais cela n'est pas très concluant : Marius, qui teste des techniques pour s'évader de son enveloppe charnelle, commence à vivre des expériences «bizarres» durant la nuit : «Je me réveillais, je pouvais ouvrir mes yeux mais je ne pouvais pas bouger et j'étais totalement paralysé. J'entendais des voix et je sentais des choses. C'était entre le rêve et la réalité, mais j'étais pourtant bien conscient.» Ces expérimentations l'effrayent et le jeune homme décide de s'en éloigner.
Un voyage qui change sa vie
Puis, c'est son voyage en Thaïlande qui «change [sa] vie». Loin de tout, au milieu de la nature, «on ne doit parler à personne, et ne regarder personne dans les yeux». Une sorte d'«initiation» qui consiste à méditer huit heures d'affilée chaque jour : «Rester assis et faire le vide dans son esprit. Il s'agit de mettre en pratique les techniques apprises.» Là-bas, pour chercher le bonheur et découvrir une autre réalité, Marius déchante rapidement : «Au bout de trois jours, j'ai commencé à me sentir très mal. Cela ne collait pas du tout avec ce que je cherchais.» Plus les jours passent, plus le moral de Marius se dégrade : il rencontre le responsable des lieux – le seul avec qui il a le droit de parler – mais ce dernier ne comprend pas sa situation. Par ailleurs, le stage exige de ne pratiquer aucun rituel et de n'avoir aucun signe d'une autre religion dix jours durant. Marius prend donc la décision de ne pas «prier» comme il a l'habitude de le faire pendant le temps du stage et dit à Dieu : «Je te laisse tomber un moment !» Aujourd'hui, il a le sentiment que, suite à cette décision, Dieu lui a répondu: «Ok, moi aussi !» «Je crois ne m'être jamais senti aussi mal de ma vie», poursuit Marius. «Je pleurais toute la journée, je ne savais pas ce qui se passait.» Il pense même au suicide durant ce séjour.
Des « clins Dieu »
Sorti de ce temple «plus mal que jamais», le jeune homme s'imagine qu'à son retour en Suisse, il finira en hôpital psychiatrique, et met bien un an avant de s'en remettre. Heureusement, Dieu avait d'autres plans. Avant de s'envoler pour la Thaïlande, lui et son colocataire avaient découvert deux évangiles dans leur boîte aux lettres : après l'expérience désastreuse du monastère, Marius se met à chercher de l'aide «là où je pouvais en trouver». Il débute donc sa lecture, crie à l'aide et s'étonne des «clins d'oeil» de Dieu et de ces «coïncidences». Puis, le pasteur d'une Eglise de Neuchâtel, qu'il avait visitée en de rares occasions, l'appelle afin de lui proposer de discuter de son voyage. Il commence à fréquenter cette communauté. «Je n'ai pas vécu un miracle de transformation instantané, mais cela s'est fait petit à petit. J'étais tellement mal que c'était la seule chose à laquelle me raccrocher. La seule solution.» Aujourd'hui, Dieu est un «appui concret» dans sa vie: «J'ai l'impression de m'être fait démolir et d'être, encore maintenant, en train d'être reconstruit.» Féru de dessin, Marius a débuté de nouvelles études dans une école d'art à Lausanne.
Joëlle Misson