Un séminaire « Stop pauvreté 2015 » plaide pour une « mission intégrale »

mercredi 28 février 2007
Dans certaines de nos Eglises, la campagne « Stop pauvreté 2015 » ne convainc guère. Notre priorité n’est-elle pas d’évangéliser et d’implanter des Eglises là où Jésus-Christ n’est pas connu ? Il ne s’agit pas d’opposer des priorités, mais au contraire de réconcilier les deux mains de la mission. C’est ce qui ressort d’un séminaire organisé samedi 24 février 2007 à Crissier par la Plate-forme chrétienne de développement du Réseau évangélique.

Le développement, la lutte pour la justice et contre la pauvreté, la sauvegarde de la création, est-ce vraiment là la vocation des Eglises ? Les Eglises de la FREE, à la suite de l’Alliance évangélique mondiale et du Réseau évangélique en Suisse romande, se sont lancées dans la campagne « Stop pauvreté 2015 », afin de mobiliser tous les chrétiens autour des «Objectifs du Millénaire pour le développement». Auraient-elles, ce faisant, oublié leur mission première?
C’est pour répondre à cette interrogation que la toute jeune Plate-forme chrétienne de développement organisait samedi 24 février dernier un séminaire à Crissier avec Reto Gmünder, ancien secrétaire général de Pain pour le Prochain. Une trentaine de personnes, représentant une bonne vingtaine d’organisations évangéliques romandes, ont répondu à l’invitation.

Réconcilier les deux mains de la mission
Roger Zürcher, coordinateur de la Plate-forme, ouvre la journée par un récit qui montre avec force le poids des actes dans le témoignage chrétien : un pasteur tchadien d’origine citadine s’était installé dans un village. Menacé de mort pour avoir assisté jusqu’au tribunal un voisin dont la fille avait été emmenée de force pour être excisée, il a eu le soutien spontané des musulmans de ce village, venus lui dire : «On te défendra!».
Jean-Daniel André, coordinateur romand de la campagne « Stop pauvreté 2015 », introduit le thème et l’orateur. Il plaide pour une mission «intégrale», où les «deux mains» de la mission, l’évangélisation et l’action sociale, se joignent.
Reto Gmünder, l’orateur du jour, est un pasteur réformé. Il a étudié la théologie à Lausanne, Berne et Bangalore (Inde). Il a travaillé ensuite plusieurs années en Asie et en Afrique. Sa vision du développement est ancrée dans une solide réflexion théologique et une expérience de 5 ans au sein du «Cercle international pour la promotion de la création», une ONG chrétienne camerounaise. De ces échanges est né un ouvrage publié en Afrique, « Evangile et développement », une réflexion chrétienne à lire absolument!

Est-ce vraiment notre priorité?
L’orateur nous entraîne d’abord dans un jeu de rôles, dont l’enjeu est l’argumentation au sein d’un Conseil d’Eglise divisé sur l’opportunité de s’engager pour la campagne « Stop pauvreté 2015 ». Les objections surgissent alors comme une musique connue : «Nous ne sommes pas contre, mais c’est une question de priorités. Nous n’avons pas les ressources pour tout faire. Un grand nombre d’organisations sont engagées dans les programmes d’entraide, de promotion de la justice, etc., et le font bien. Si nous n’annonçons pas l’Evangile, personne d’autre ne le fera...»

Dans la Bible, chacun doit manger à sa faim
En contrepoint à cet échange virtuel d’arguments, cinq groupes s’attellent à quatre textes bibliques. Quatre textes sur le problème de la faim : Joseph chargé de prévoir une famine et de planifier la création de réserves et la redistribution (Gen 41), une loi qui exige des cultivateurs de laisser aux pauvres et aux étrangers de quoi grappiller (Lév 19), la multiplication des pains (Mat 17) et le récit où les disciples se servent de blé dans un champ en plein sabbat (Marc 2). Un constat général : le problème de la faim (l’Objectif du millénaire pour le développement n° 1) est vraiment une préoccupation divine. Quant aux solutions, elles englobent tout le champ des engagements, du plus étatique au plus personnel, en passant par l’appel à un style de vie qui permet aux laissés-pour-compte de vivre, appuyés par une législation, sans oublier les actes de foi osés et l’appel à une spiritualité qui se met au service de l’être humain... Voilà de quoi tordre le coup à l’idée qu’il faudrait d’abord évangéliser – ou d’abord résoudre les problèmes politiques, selon avec qui vous parlez !

Vers une mission intégrale
L’orateur nous présente alors comment ont évolué à la fois la compréhension de la mission chrétienne et celle du développement depuis un demi-siècle. L’ère de la croyance naïve dans un «rattrapage économique» et une croissance qui résoudrait tous les problèmes est peut-être révolue. Mais ne se contente-t-on pas alors de manière presque défaitiste de «lutter contre la pauvreté», impuissants à en soigner les causes ? Quant à la mission chrétienne, elle a passé par divers stades, mettant l’accent sur la christianisation, sur le salut individuel, sur l’implantation d’Eglises, pour arriver à une vision plus globale qui voit la mission de l’Eglise comme la participation à celle de Dieu dans ce monde. Mais ces stades continuent à se superposer...
Est-il possible de réconcilier ces deux évolutions avec une vision à la fois plus large et plus approfondie de notre mission dans ce monde ? C’est l’ambition de la réflexion que nous propose l’orateur, avec un enracinement théologique et biblique solide, et qui nous met en chemin. Pour annoncer une Bonne Nouvelle qui est parole de changement, qui nous met en marche concrètement dans ce monde, en direction d’un ailleurs toujours au-delà de ce que l’on peut imaginer ou connaître. Pour que nous nous engagions en faveur des Objectifs du millénaire pour le développement, mais en visant mieux que les indicateurs statistiques minimalistes énoncés, avec les valeurs et l’espérance de l’Evangile.

Une réflexion à poursuivre
Mais comment articuler concrètement ces deux mains qu’on veut réconcilier ? La réflexion mérite d’être poursuivie. Particulièrement dans les situations où l’on doit précisément éviter de mélanger action sociale et évangélisation – parce que les bailleurs de fonds l’imposent, parce que l’honnêteté et la gratuité de l’Evangile l’exigent ou parce qu’un environnement sociopolitique hostile au christianisme rendent cette séparation nécessaire... Sans doute faudra-t-il d’autres séminaires pour approfondir ces questions!

Silvain Dupertuis

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