A l'initiative notamment de deux pionniers évangéliques de la branche, une première formation d'aumôniers en entreprise est intervenue du 19 au 21 mai dernier à Bienne. Organisée à l'échelle nationale, « elle a vraiment été un succès à notre avis et aux dires des participants », indique à Vallorbe Samuel Ribagnac, l'une des trois chevilles ouvrières de l'exercice et aumônier à 80% dans l'entreprise Aligro. Une répétition de ce premier cours de base doit d'ailleurs avoir lieu en automne pour permettre la formation de nouveaux aumôniers potentiels. « Sur la vingtaine de participants, le quart était romand, et nous avons eu aussi bien des hommes que des femmes. Plusieurs émanaient des sphères sociales ou pastorales. »
Pasteur du rail
Très interactifs, les modules de cours ont abordé le travail d'écoute, les systèmes de croyances, mais aussi les questions pratiques comme les différents processus d'accompagnement, la prière et les limites que l'aumônier doit se poser.
Parmi les participants, un pasteur du rail était présent : « Nous avons ainsi découvert qu'il existait des aumôniers aux CFF et cela a été une belle surprise pour nous », commente Samuel Ribagnac1. Si l'expérience humaine et professionnelle des participants a été valorisée, l'idée d'atteindre les « top managers » par un service de consultants a émergé. « On a réalisé que plusieurs entreprises étaient intéressées à introduire un aumônier dans leurs équipes ; et pas toujours des entreprises chrétiennes. » Samuel Ribagnac et ses deux compères, Yves Jaques et Daniel Zwahlen, vont dès lors s'occuper de présenter la profession aux entrepreneurs, puis de mettre les intéressés en contact.
Une association
L'année dernière, ils ont fondé l'association Swiss Workplace Chaplains 2. Elle est basée sur les principes chrétiens tout en respectant les autres croyances, peut-on lire dans ses statuts. Cela signifie clairement qu'elle s'adresse à des chrétiens uniquement et que la formation qu'elle dispense par conséquent aussi. Le contact avec des employés d'autres traditions religieuses ? « La question spirituelle vient seulement si la personne l'aborde », estime Samuel Ribagnac, qui propose néanmoins la prière parfois aux près des 600 employés que compte Aligro dans ses 4 marchés romands. « Avec une employée musulmane, j'évoque le Dieu créateur, c'est notre plateforme commune », illustre pour sa part Yves Jaques, employé à 60% par le groupe Boas, qui emploie plus de 1000 employés dans ses différents EMS et hôtels.
Les deux aumôniers sont au bénéfice d'une formation pastorale. Pas de prosélytisme pour autant, assurent-ils. « Je suis un complément au travail des RH (ressources humaines), à la vie d'un EMS ou d'un hôtel ; une personne ressource », définit Yves Jaques, qui affectionne le mot de vis-à-vis pour décrire sa fonction : « On n'est pas dans la hiérarchie et on n'a aucune autorité : on peut accueillir la personne et la suivre dans ce qu'elle vit, que ce soit au niveau professionnel ou personnel. »
Gabrielle Desarzens
1 www.railhope.ch
2 Les trois Suisses se sont inspirés du modèle américain Marketplace chaplain qui est une grosse société d'aumônerie d'entreprise aux Etats-Unis. « C'est presque une œuvre d'évangélisation en Amérique, mais nous avons écarté ce volet qui nous semblait ne pas correspondre à la culture helvétique », commente Samuel Ribagnac.