Le clip vidéo intitulé «Cultes confinés - Petit survol», qui accompagnait l’article «Evaluation des cultes online des Eglises FREE» a été retiré de la chaîne de diffusion. Certaines personnes se sont senties «jetées en pâture» par le clip, alors qu’il était question de faire réagir les lecteurs et de ne pas caresser les intervenants dans le sens du poil.
En lien avec l’analyse des cultes online des Eglises FREE, nous avons également réalisé un sondage auprès de quelques pasteurs à l’aide d’un questionnaire. Il en est ressorti que les plus grands problèmes de nos responsables d’Eglise étaient de trouver des gens compétents, de gérer de nouveaux instruments techniques et d’adapter le contenu.
La vidéo, un intrus triomphant et «chahuteur»
En fait, le monde des images et de la vidéo, c’est comme ce bonhomme de la caricature qui surgit au milieu d’un texte. Il le déchire en partie. L’image vidéo qu’on a été obligé d’utiliser a fonctionné comme un intrus, triomphant et chahuteur. Elle ne valorise pas le texte et toute la manière de rendre compte de ce texte. En bref : il est difficile de transposer nos cultes sur support numérique.
L’image par rapport au texte est toujours plus imposante dans sa manière de dire ou de ne pas dire les choses. Ce n’est pas pour rien que Dieu interdit le recours à l’idole, puissant rouleau compresseur de la spiritualité. L’image, c’est comme une loupe grossissante de ce qui est bien, mais aussi de ce qui est mal (du point de vue de l’image). Si vous lisez un texte à l’écran, comme un élève dans sa classe d’école, un certain public ne vous le pardonnera pas, parce qu’il est habitué à des stand-upper (quelqu’un qui donne l’impression d’improviser, alors que que son texte est composé pour la diffusion orale et appris par coeur).
Lorsque vous écrivez, vous faites attention à la grammaire. Avec l’image, c’est pareil. Il y a une «grammaire visuelle» et nos spectateurs-auditeurs sont des gens de plus en plus au clair avec les mises en images. Ils n’acceptent plus n’importe quoi. Comme pour l’écriture, on ne s’improvise pas présentateur ou prédicateur TV. Il y a certaines personnes qui passent bien à l’écran – c’est leur talent! –, et d’autres pas.
J’avais l’impression, en visionnant des bouts de culte online, que certains protagonistes se sont dit: «Bon, on est entre nous. Les gens comprendront! Vite fait, bien fait sur le gaz.» Seulement, ce dont on ne s’est pas rendu compte, c’est qu’au travers des réseaux sociaux, comme Youtube, Facebook ou Zoom, on est sur la place publique, au vu et au su de tout le monde.
Cette pandémie nous a mis devant une réalité existentielle différente. On découvre à nouveau notre fragilité humaine, mais dans le domaine de l’Eglise se découvre une autre fragilité, celle de la difficulté du contact avec notre prochain, dans un univers qui nous est étranger. C’est plus facile de prêcher devant un public captif, vissé sur sa chaise, qui ne peut pas aller fumer une clope ou boire un café, pendant que le prédicateur finit son speech ennuyeux. En guise d’excuse, c’est plus simple de décréter que le monde est postmoderne et qu’il ne s’intéresse plus à Dieu.
Comment continuer?
C’est comme si, à la Réforme, sous prétexte de l’émergence de l’imprimerie, les réformateurs avaient transformé leur église en librairie. On aurait lu et commenté des livres. On aurait partagé nos expériences avec le livre. On se serait échangé des bouquins. Ce n’est pas ce qu’ils ont fait. Par contre, ils se sont inspirés de la manière de parler, d’analyser et de communiquer du livre pour rencontrer leur auditoire. Nous sommes appelés à nous inspirer du plateau de télévision pour communiquer, sans transformer l’Eglise en show télévisuel. Ce qui veut dire qu’il ne faut pas forcément continuer à diffuser nos cultes sur le net. Ça demande beaucoup de compétences.
Toutefois, dans nos murs, on ne pourra pas s’éviter un relookage qui s’inspire de la télévision. Il faut que le prédicateur arrête de lire un texte composé pour le livre, alors qu’il communique mieux en stand up, micro à la main et sans chaire. La chaire n’existe plus que pour les politiques et les pasteurs. Il faut coller au rythme télévisuel.
Les réseaux sociaux nous ont appris à participer, à communiquer et à commenter. Où se trouve dans nos rencontres du dimanche matin la possibilité d’intervenir? On est encore dans le cadre de l’école. L’élève est là pour apprendre et écouter le maître. Mais même ce modèle est caduc dans l’école laïque où on enseigne de plus en plus par participation et par expérimentation.