Le Temps présent « Rock, miracles & Saint-Esprit » et les échos dans la presse de la tournée de Mark A. Gabriel ne devraient pas nous laisser de marbre. Un brin de sagesse dans la gestion des médias permettrait aux évangéliques de moins facilement prêter le flanc à la caricature !
Coup sur coup, deux événements médiatiques ont réveillé ces dernières semaines les évangéliques de leur torpeur. La diffusion le jeudi 21 avril sur la TSR d’une émission
Temps présent « Rock, miracles & Saint-Esprit » a laissé un goût désagréable. Des images fortes tournées lors d’une soirée guérisons à l’Eglise évangélique d’Oron (FREE) ont jeté le discrédit sur les milieux évangéliques. On y voyait le pasteur Werner Lehmann et Chris Daza du Malawi prier et imposer les mains à des gens qui, pour quelques-uns, tombaient par terre, comme évanouis. A deux reprises de telles images ont été diffusées dans l’émission. En ouverture en guise de « lancement aguicheur » et en final.
Après Temps présent, Mark A. Gabriel
Fin mai, la venue de Mark A. Gabriel, cet ancien enseignant à l’Université Al-Azhar du Caire et auteur évangélique à succès, a aussi intéressé les médias. Notamment un journaliste du gratuit
20 Minutes qui a titré bien avant la tournée, le 30 mars : « Un islamophobe radical invité de l’UDF », puis le 9 mai : « Un conférencier allergique à l’islam accueilli à l’église ». Avec une quinzaine de rencontres sur deux semaines en Suisse romande et dans la région de Lyon, il y avait de quoi discerner là, du côté du journaliste peu averti, une sensibilisation anti-musulmane très appuyée parmi les évangéliques. Et ce d’autant plus que Mark A. Gabriel avait été l’orateur le 2 avril du Congrès national de l’UDF (Union démocratique fédérale), l’un des deux partis politiques suisses à avoir soutenu l’initiative anti-minarets.
Face à ces deux événements médiatiques, les attitudes des évangéliques divergent. Certains la jouent résignés : « De toute façon, dans ce monde, nous serons persécutés... » D’autres sont franchement indignés : « Comment peut-on faire de tels événements des manifestations représentatives du milieu évangélique ? » D’autres, plus pragmatiques, se réjouissent et lancent en écho à une formule connue : « Parler en mal des évangéliques, c’est toujours en parler ! » D’autres enfin se demandent si les évangéliques filmés n’ont pas manqué de la plus élémentaire des prudences...
Quel que soit votre sentiment, il y a quelques manières de faire autour desquelles tous les évangéliques devraient s’unir afin de ne pas se laisser caricaturer comme ces deux couvertures médiatiques l’on fait :
1. « On n’est pas obligé de montrer sa chambre à coucher aux journalistes ! »
Pour éviter de prêter trop facilement le flanc à la caricature, pourquoi ne pas faire preuve d’intelligence dans notre accueil des médias ? Le milieu évangélique regorge de choses positives à montrer : l’engagement d’une Eglise auprès des enfants ou des adolescents, des démarches sociales originales, avec l’Armée du salut ou d’autres ONG, un vécu spirituel profond... Nul besoin d’inviter des journalistes à une soirée « Miracles et guérisons » où des manifestations surprenantes désarçonneront autant certains participants que les journalistes et les téléspectateurs. Un culte ordinaire est suffisamment parlant. Un bon groupe de louange, des gens qui prient les yeux fermés, une bonne assistance... voilà de quoi fournir des images déjà vues certes, mais qui conviendront très bien aux journalistes pour leur démonstration sur les évangéliques. Comme l’a joliment dit l’avocate qui préparait une équipe du Réseau évangélique à son entrevue avec l’équipe de la TSR qui a diffusé « Rock, miracles & Saint-Esprit » : « Pour parler de soi, on n’est pas obligé de montrer sa chambre à coucher aux journalistes ! »
2. Distinguons communication interne et externe
La tournée de Mark A. Gabriel a été lancée en Suisse romande par la sortie de son livre « Swislam. L’islam en Suisse : menace ou opportunité ? » Les journalistes intéressés ont reçu cette publication début mai avec comme matériel d’accompagnement un flyer mentionnant la quinzaine d’interventions de ce conférencier. Tout y était mélangé : les rencontres publiques, les soirées groupes de jeunes, les temps de formation plus théologique... Par rapport à un orateur controversé, l’effet était garanti : un nombre considérable d’Eglises évangéliques soutient la perception de Mark A. Gabriel par rapport à l’islam. Et si au lieu de tout mélanger, un tri avait été effectué entre rencontres publiques et formations internes, n’aurait-on pas levé cette impression de mobilisation des évangéliques et de mise en cause de l’islam par un de leurs champions ? Un flyer mettant en avant deux ou trois rencontres publiques aurait suffi, chaque Eglise ou groupe d’Eglises pouvant éditer en interne son propre flyer avec les manifestations intéressant ses membres et peut-être quelques personnes gravitant autour de la communauté.
Des façons de faire à adopter ?
La bonne image publique des évangéliques n’est pas l’autel sur lequel il importe de tout sacrifier, y compris notre identité ! Mais il est des manières de faire qui permettent d’éviter de prêter inutilement et injustement le flanc à la critique. Alors pourquoi ne pas les adopter ? Et ce d’autant que des chargés de communication attachés aux Eglises ou des journalistes fréquentant les milieux évangéliques se mettent volontiers à disposition de nos communautés pour apporter leurs lumières et leurs conseils... (1)
Serge Carrel, chargé de communication dans la FREE
Note
1 Certains membres du nouveau groupe de travail sur les médias du Réseau évangélique (l’ancien Media-Forum) sont à disposition, comme le chargé de communication de la FREE d’ailleurs.
www.media-forum.ch