Pour aller plus loin face à la crise écologique

Serge Carrel vendredi 16 avril 2021

Les éditions Je Sème de la FREE viennent de rééditer un « classique » de la réflexion biblique et théologique évangélique en lien avec la crise écologique que nous traversons. Le livre de Dave Bookless « Dieu, l’écologie et moi », à nouveau disponible, est l'occasion de présenter quelques contributions marquantes, personnelles et livresques, autour de ce thème en lien avec les milieux évangéliques. Il y a de quoi lire, écouter et voir!

1. Des actions écologiques menées par des évangéliques

Dave Bookless : une décharge devient parc public

En 1993, Dave Bookless est nommé pasteur dans une paroisse de l’Église anglicane à Southall, dans la banlieue ouest de Londres. Sensibilisé à la question écologique par l’ONG A Rocha, il souhaite créer un lieu de référence pour la cause écologique au Royaume-Uni. Contrairement à ce qui se fait déjà dans le cadre d’A Rocha où d’ordinaire de tels lieux sont choisis parmi des endroits d’exception à préserver, Dave Bookless s’intéresse à une décharge à ciel ouvert dans le périmètre de sa paroisse. Dans cet endroit très convoité par les promoteurs immobiliers, on trouve des carcasses de voitures calcinées, des pneus usagés, des gravats de toutes sortes… Au fil des ans, tout cela est venu encombrer une surface de quelque 36 hectares…

Un pasteur impacte son environnement

Dave Bookless est convaincu que cet endroit pourrait devenir un parc pour la faune… et la population alentour ! Il parvient à convaincre les autorités locales de la pertinence de faire de ce lieu un parc public. Ouvert à l’été 2003, le parc Minet est aujourd’hui un lieu de repos et d’initiation à l’écologie pour une population de banlieue précarisée, souvent coupée de tout lien à la création. Pour ces Londoniens, le parc Minet est aussi un espace où la biodiversité s’épanouit à nouveau. Une grande variété d’insectes s’est réinstallée ; des oiseaux ont fait de ce parc un relais dans leur parcours migratoire…

La création du parc Minet est une magnifique histoire racontée dans « Un Dieu zéro déchet ! » On y découvre qu’avec des convictions, il est possible de changer la destinée d’un bout de terrain, corrompu par l’activité humaine.

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Dave Bookless, Un Dieu zéro déchet !, Dossier Vivre 42, trad. franç. Anne Emmett, Saint-Prex, Je Sème, 2019. A commander ici. Voir aussi la conférence de Dave Bookless: « Un Dieu zéro déchet ! »

 

Henri Girard : faire reverdir le Sahel grâce aux bocages

Henri Girard est d’origine française. Il vit depuis 30 ans au Burkina Faso où il est marié à Marthe, une Burkinabé. En 1989, il s’installe dans le village de Guiè à 60 kilomètres au nord de Ouagadougou. Ce technicien agricole a fait un rêve : « Faire reverdir le Sahel ! »

Henri Girard commence très modestement. Il se met à l’écoute des villageois. Il découvre leurs techniques agricoles… et petit à petit, en tâtonnant avec des amis burkinabés, comme il le relève dans un livre-interview, il met au point des techniques agricoles qui visent tout d’abord à structurer la terre des paysans en parcelles. Comme dans certaines régions du nord de la France ou d’Angleterre, ces parcelles sont entourées de haies avec du grillage qui empêchent les animaux de pénétrer sur la terre cultivée.

Des mares en bas des parcelles

Pour bénéficier au maximum des ressources hydriques de la région, au bas de chacune de ces parcelles, Henri Girard installe une sorte de mare qui collecte l’eau et permet ainsi d’en bénéficier lorsque la saison sèche est venue. Pour compléter le tableau, ce technicien agricole promeut ce qu’on appelle sur place le zaï, une technique qui vise à creuser régulièrement sur la surface du champ des trous de 30 à 40 centimètres de diamètre et de 20 centimètres de profondeur, d’y mettre du compost, de recouvrir avec un peu de terre, puis d’y semer les céréales à cultiver.

« Ma foi m’a aidé, d’un point de vue personnel, à accomplir ce projet : ma motivation a gagné en profondeur, j’y ai puisé une force et une inspiration nouvelles qui ont donné davantage de sens à mon engagement initial, notamment pour que l’être humain vive de façon plus harmonieuse avec le milieu naturel qu’il est appelé à cultiver et conserver. »

 

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Frédéric Baudin, Wégoubri, un bocage sahélien. Entretiens avec Henri Girard, s. l., CEM, 2017.

 

Miranda et Peter Harris : les débuts d’A Rocha

A Rocha est aujourd’hui un réseau d’organisations chrétiennes de défense de l’environnement actives dans une vingtaine de pays. Fondée en 1983 par Peter Harris et Miranda, son épouse –  tragiquement disparue dans un accident de voiture en 2019 –, cette ONG a vu le jour au sud du Portugal dans la région de l’Algarve. Ce sont ces débuts que raconte Peter Harris dans le livre « Foi d’écolo ».

Pasteur anglican dans la région de Liverpool, Peter est un passionné d’ornithologie. Avec Miranda, il envisage de partir en Afrique pour y faire de l’enseignement théologique. Mais c’est finalement au Portugal que ce couple s’installe et lance A Rocha.

Cette organisation soutenue par des fonds britanniques commence par acheter une maison, Cruzinha, pour en faire un centre de recherches scientifiques, qui baguera et étudiera les oiseaux dans une région sous pression à cause du développement du tourisme.

Une œuvre de foi

Dans son livre, Peter Harris évoque les incertitudes financières des débuts, l’achat de leur centre, l’implication dans les grands débats locaux sur l’avenir de la région et la préservation de zones particulièrement sensibles pour l’avenir des oiseaux, notamment migrateurs.

Les débuts d’A Rocha au Portugal sont aussi marqués par le témoignage chrétien dans un cadre familial et communautaire.

Dans les années 80, Peter Harris développe une perception nouvelle de la mission qui peut se faire dans un contexte où la rencontre de chrétiens et de non-chrétiens est donnée par l’objet d’étude et l’horizon de la lutte écologique. Ce pasteur devra se battre pour réhabiliter le thème de la création dans un contexte évangélique où ce qui compte, chez beaucoup, c’est uniquement le salut des âmes.

En 1995, la famille Harris quittera le Portugal pour s’établir en France. Depuis 2010, elle vit à nouveau en Angleterre.

 

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Peter Harris, Foi d’écolo. Une vie de famille devient mouvement pour l’environnement, Marne-la-Vallée, Farel, 2005.    

 

2. Écologie et théologie

Dave Bookless : un livre « coup de poing » pour un autre regard sur le monde

« Dieu, l’écologie et moi » est un livre qui a profondément changé la vie de nombre de chrétiens évangéliques. Parce qu’il invite à un retravail en profondeur de notre perception de la foi chrétienne. Avec ce qui a tout d’un livre « coup de poing », le pasteur anglican Dave Bookless, longtemps directeur théologique de l’ONG A Rocha, considère la « grande image » ou le « grand récit biblique » avec ses différents thèmes : création, chute, Israël, Jésus et les temps futurs. Dans chacun de ces thèmes, il montre que le Seigneur ne s’intéresse pas qu’au seul être humain et à son salut, mais qu’il envisage un salut pour l’ensemble du créé.

Jésus, Sauveur du créé

A partir du chapitre 1 de l’épître aux Colossiens, Dave Bookless souligne que Jésus est non seulement la source de la création, mais son soutien et son sauveur. Il y a non seulement une dimension cosmique aux souffrances de Jésus à la croix, mais sa résurrection est garante d’une espérance pour les croyants, mais aussi pour l’univers matériel.

Cette nouvelle manière de lire la Bible montre que l’être humain n’est pas le centre du projet de Dieu, mais que c’est sa création, que la terre n’est plus là uniquement pour l’être humain, mais pour Jésus, et que nous sommes sur terre pour participer avec le Christ à l’œuvre de restauration des relations brisées avec le Père, avec soi-même, avec son prochain et avec la création. « Parce que Dieu a tant aimé le ‘cosmos’ (le monde) qu’il a envoyé Jésus » (Jean 3.16).

Un fondement pour un engagement écologique

Au quotidien, cette nouvelle perception de l’être humain au sein de la création entraîne des conséquences sur notre manière d’être disciple, sur notre louange, sur notre mode de vie et sur notre mission. De quoi ouvrir un chemin d’espérance dans une époque assombrie par nombre de catastrophes écologiques. « Notre tâche en tant qu’êtres humains est d’apporter la Bonne Nouvelle de Jésus à toute la création, en paroles et en actes. »  

 

Livre Bookless Dave
 

Dave Bookless, Dieu, l’écologie et moi, trad. franç. Anne Emmett, Dossier Vivre 37, Saint-Prex, Je Sème, 20212. A commander ici.

Voir aussi : Dave Bookless, « Une vision d’ensemble : la mission de Dieu du début à la fin » in Michaël Gonin (dir.), Se soucier de la terre et des hommes, Saint-Légier, HET-PRO, 2021.

 

Francis Schaeffer, un précurseur

Le philosophe Francis Schaeffer est un évangélique américain qui a vécu de nombreuses années dans les Alpes suisses, tout près de Villars-sur-Ollon. Il animait L’Abri, un centre communautaire, qui accueillait des étudiants, principalement anglo-saxons, qui s’interrogeaient sur la foi chrétienne. En 1970, il publie en anglais « La pollution et la mort de l’homme », un livre où ce philosophe fait le constat que les Églises ont failli en matière écologique. Tout particulièrement parce qu’elles n’ont pas donné sa juste place au thème de la création de Dieu. Francis Schaeffer les appelle à se réveiller et à devenir les avocates d’une réconciliation de l’être humain avec la terre.

La terre n’est pas un objet !

Francis Schaeffer invite aussi les chrétiens à travailler leur vision du monde. Dans un contexte où l’être humain a perdu tout sens de Dieu derrière la nature, où il a réduit la nature à un objet, cette nature peut être utilisée par l’être humain comme bon lui semble. Exploitée, détruite, violée… En reprenant l’exemple de François d’Assise, l’auteur du Cantique des créatures au XIIIe siècle, Francis Schaeffer invite les chrétiens à faire des oiseaux leurs frères, à faire du bouton d’or son camarade… à percevoir que tout ce qui nous entoure est le fruit du travail de Dieu. Le vivant est créature, tout comme l’être humain.

Voilà 50 ans, ce philosophe évangélique américain développait un plaidoyer bien loin d’avoir été entendu de ce côté-ci de l’Atlantique tout comme au-delà… Un plaidoyer qui encourage les sceptiques de tous ordres à s’associer à la « conversion écologique » à laquelle nous sommes appelés, si nous souhaitons limiter le réchauffement climatique à 1,5 ou 2 degrés d’ici 2100, un des objectifs de l’accord de Paris sur le climat, adopté en 2015.

 

Appel à la libert Tchanz
 

Francis Schaeffer, La pollution et la mort de l’homme. Un point de vue chrétien sur l’écologie, Marpent, BLF Éditions, 2015, 128 p.

 

3. Pour les enfants et les ados

Une BD écologiste qui n’a pas peur de l’autodérision

 « Écolos par nature » est une BD pour enfants qui rassemble une série de planches parues dans le journal pour enfants et adolescents « Tournesol », édité par la Ligue pour la lecture de la Bible. C’est l’histoire d’un garçon prénommé Bruno, qui veut inscrire des gestes écologiques, des éco-gestes dans son quotidien. Ce Bruno est accompagné d’un petit rat, Hugo, qui fait office de miroir critique, souvent humoristique, par rapport à tout ce qu’entreprend Bruno. C’est qu’il est très actif ce garçon. Il souhaite promouvoir le tri soigné des déchets. Il veut qu’autour de lui on économise l’énergie, qu’on lutte contre la pollution de l’air ou la pollution sonore, qu’on favorise les énergies vertes et notamment les panneaux solaires.

Larry Goetz est le scénariste qui développe le propos de sensibilisation à la question écologique. Guillaume Albin est le dessinateur de la série. Cet illustrateur professionnel habite la région française Centre-Val-de-Loir et travaille sur plusieurs univers différents, mais principalement dans le genre « Fantaisie parodique ».

 

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Guillaume Albin et Larry Goetz, Écolos par nature, Valence, LLB, 2020.

Serge Carrel

  • Encadré 1:

    Des chroniques audio sur Radio R

    Pour la campagne de sensibilisation StopPauvreté, le journaliste Serge Carrel a réalisé une trentaine de chroniques autour de la crise écologique. A écouter sur le site de Radio R.

  • Encadré 2:

    Des émissions avec DieuTV

    En partenariat avec DieuTV, une quinzaine d’émissions ont été réalisées autour du thème : « Crise écologique : des chrétiens s’engagent » avec des invités comme Irène Zurbrügg, Roger Zürcher, Frédéric Baudin, Henri Girard… Elles sont disponibles sur la page YouTube de lafreetv.

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