«The Turning» : une journée à Gland avec Guy Gentizon

Guy Gentizon jeudi 31 octobre 2019

Le projet « The Turning » (le « virage ») en Suisse romande proposait aux chrétiens de vivre deux semaines entre Eglises pour partager l’Evangile aux habitants de leur région. En fonction des vacances scolaires, la première semaine a eu lieu du 12 au 19 octobre dans le nord de la Suisse romande: dans les cantons de Berne, Jura et Neuchâtel. La seconde a eu lieu du 19 au 26 octobre dans les cantons de Vaud, Genève, Valais et Fribourg. Témoignage d’une journée du « Turning » à Gland par Guy Gentizon, pasteur retraité.

Jeudi 24 octobre, je me joins à la vingtaine de chrétiens, jeunes et moins jeunes, qui se retrouvent dans les locaux de l’Eglise évangélique Arc-en-Ciel de Gland (FREE). Nous allons sur le « terrain ». Le trio au sein duquel je suis intégré avec Thomas et Fanny, une jeune croyante, se rend dans le nouveau quartier d’Eikenøtt, sis en bordure de l’autoroute, avec ses 1'300 habitants qui y vivent depuis 5 ans.

Au QG « secondaire » de La Côte à Gland

Je sais que parmi eux deux joueurs de pétanque du groupe des aînés de la ville y demeurent. Il m’est arrivé de prier dans la rue pour le premier. Le second s’est intégré au club depuis peu et je n’ai aucune idée de ses croyances. En à peine une heure, je vais croiser leur chemin ! Le premier a déjà été abordé par des équipiers il y a deux jours. C’est néanmoins une opportunité de le bénir et de l’encourager à rejoindre le groupe de maison du quartier. Justement cela tombe bien, parce c’est le responsable de ce groupe de maison qui est la personne chargée du contact de suite qu’on l’a encouragé à rencontrer.
J’aborde le second de mes collègues du club de pétanque en lui adressant les deux phrases d’approche censées nous permettre d’entrer en matière sans détour. « Sait-il que Dieu l’aime et que Dieu a un projet de vie pour lui ? » Je le vois abasourdi, ayant peine à reprendre son souffle. Il est très surpris d’apprendre que je suis pasteur retraité. Lui-même a suivi une formation en Ecole biblique il y a bientôt 40 ans. Mais les vicissitudes de la vie ont fait que, s’il continue de croire en Jésus, par contre il n’a plus de contacts avec une Eglise. Pour lui cette rencontre est l’occasion de renouer avec la fréquentation d’une communauté. Il est aussi très étonné d’apprendre qu’un groupe de maison a lieu à quinzaine dans le bâtiment voisin de son appartement.

D’autres rencontres : que de surprises !

Parmi les personnes rencontrées en matinée et dans l’après-midi un homme, la trentaine. Sans qu’on en soit conscient, le responsable du groupe de maison dont on a parlé est à peu de distance, témoin de cette rencontre. Il prie, car cet interlocuteur est son voisin dans le coin de jardin mis à disposition par la ville et il a déjà pu lui tendre quelques perches. L’homme est honnête, droit de cœur. Il nous dit avoir reçu une éducation catholique, mais est très troublé par la situation de notre planète. Au point de se demander si Dieu existe vraiment et s’il n’a pas abandonné l’humanité. Au moment où nous lui communiquons la troisième phrase du canevas mis à disposition pour aborder nos interlocuteurs potentiels (« Si vous deviez décéder aujourd’hui, êtes-vous certain d’aller au ciel ? »), il admet qu’il n’en sait rien. Il est d’accord de découvrir alors trois brefs textes bibliques dans l’épître aux Romains, évoquant le fait que tous ont péché, que le salaire du péché c’est la mort, mais que la foi dans l’œuvre de Christ nous permet d’accéder au pardon et à l’assurance de la vie éternelle. Le tout se conclut par une prière qui scelle une démarche de foi, qu’il est encouragé à considérer avec sérieux. En le quittant après un échange de coordonnées, nous sommes reconnaissants pour le climat paisible et profond de ce quelques minutes passées ensemble. Apercevant un adolescent assis sur un banc, nous découvrons qu’il est musulman, comme ses parents. Mais pas pratiquant. Là également, en toute simplicité, un contact cordial est établi. Avec à la clé une proposition (via instagram) qu’il puisse rejoindre un groupe de jeunes chrétiens à Gland. Plus tard, en duo avec Yves, le responsable du groupe de prière du quartier, nous croisons un jeune homme bien pressé. Il est d’accord de nous accorder quelques précieuses minutes, mais il est en pause de midi et n’en a qu’une trentaine à disposition. Lorsqu’on lui parle de textes bibliques, nous apprenons que des amis, protestants engagés, lui ont offert une Bible il y a quelques semaines. Il n’a pas encore vraiment pris le temps d’ouvrir le paquet et surtout il se demande s’il arrivera à comprendre ce qu’il lit. Là également : échange de coordonnées et encouragements à ce qu’il honore sans crainte la découverte du présent reçu.

Temps de débriefing révélateur

Lors du temps de débriefing à mi-journée, les participants ont l’occasion de partager leur vécu. Beaucoup d’étonnement à l’ouïe de ces récits qui nous enthousiasment. Finalement une membre du Conseil pastoral de l’Arc-en-Ciel remercie vivement deux des responsables du « QG local » : deux jeunes pères de famille. Mikaël et Philippe vont chaque mois, depuis plusieurs années, dans la rue, alternativement à Rolle, Nyon, Gland, pour de l’évangélisation. Essayant de stimuler les chrétiens de la région à les rejoindre. Ils sont eux-mêmes reconnaissants de cette semaine « folle ». Alors qu’en général ils se retrouvent à 2 ou 3 pour ces moments dans les rues, durant ces journées ils ont vu des dizaines d’évangélistes les rejoindre. Sans parler de tous les autres impliqués dans l’ensemble de la Suisse romande. Je constate alors que, sont présents à ce débriefing, cinq des six personnes qui se retrouvent chaque semaine pour un moment de prière axé sur l’évangélisation de la ville, voire de la région. A ce moment, je prends mieux conscience que, si tous ne peuvent pas aller sur le terrain, néanmoins chaque enfant de Dieu peut être impliqué dans ce beau et noble mandat qui consiste à transmettre cette Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ pour tous les hommes. Dans ce groupe, nous prions pour l’ensemble des Eglises et des croyants, demandant à Dieu qu’il permette à chaque communauté d’entrer pleinement dans son appel en vue de transmettre l’interpellation du salut. Mais également pour que Dieu suscite des évangélistes. Et il est en train de le faire, sous nos yeux, d’une manière très encourageante et stimulante.

Unité et complémentarité d’action du Saint-Esprit au sein du Corps de Christ

Les soirées de louange, de témoignages, d’enseignement et de prière en présence des frères et sœurs de quatre communautés évangéliques de Gland et de celle de Rolle me réservent encore une belle surprise. J’y rencontre une dame de mon immeuble, avec sa fillette. Que fait-elle là ? Serait-elle croyante ? On me confirme qu’en effet elle a donné récemment sa vie à Jésus. J’en suis tout ému. Certes, cela fait dix-neuf ans que je prie pour les locataires des bâtiments de mon quartier, mais sans beaucoup de fruit. Cependant le Seigneur a permis qu’elle ait sur son chemin des chrétiens engagés qui lui ont indiqué la Voie. L’un sème, l’autre récolte. J’en suis d’autant plus fortifié qu’en réalité, au milieu de la semaine, en sortant de mon appartement, j’ai croisé un voisin, jeune retraité, avec lequel ces dernières semaines il y avait eu parfois une possibilité très furtive d’amorce de témoignage. Mais à ce moment précis, il s’assied sur une marche, mégot à la main, et souhaite davantage de partage. En le quittant pour rejoindre les équipiers qui vont aller dans les rues, je prends conscience que, très certainement, l’intercession spécifique à grande échelle des chrétiens de Suisse romande pour cette action d’évangélisation a manifestement ouvert des cœurs d’une manière surprenante dans les secteurs où se vit « The Turning ».

Dieu seul fait croître !

Certes, toutes les personnes rencontrées n’ont pas manifesté une telle ouverture de cœur. Nous en étions prévenus. Tout en respectant les personnes peu enclines à entrer en matière, les directives reçues étaient claires : nous ne sommes pas là pour argumenter, mais pour discerner les personnes prêtes à vivre un bout de chemin sur les pas du Ressuscité. En étant attentifs au fait de ne pas négliger la perspective d’un suivi. C’est à cette fin que nous demandions les coordonnées, en vue d’offrir à chacun un premier rendez-vous dès que possible, afin de poursuivre les échanges amorcés, sur la base d’un canevas de formation de disciples.
Nous ne sommes pas capables de transformer le cœur des gens ou de veiller à ce que nos efforts fidèles donnent des résultats. C’est le travail du Saint-Esprit. Pourtant Dieu a choisi de faire de nous des ouvriers dans sa moisson. C’est Dieu qui fait croître ce que nous avons semé. Tout est une question de grâce divine. Dieu continue d’élargir son royaume par sa grâce (Marc 4.26,27).
Prions pour que ce qui a été semé porte du fruit à Sa gloire dans les cœurs.
Et sachons que les cœurs de nos voisins et ceux que nous croisons dans la rue sont peut-être davantage assoiffés de rencontrer Dieu que ce que nous pouvons penser. Mais nous ne le saurons qu’une fois que nous leur aurons posé la question. La démarche proposée par « The Turning » est, dans ce sens, excellente pour le découvrir.
Guy Gentizon
Pasteur retraité

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