Aujourd’hui, il est interdit de fumer dans une chambre d’EMS, mais permis de solliciter Exit pour apporter le poison qui permet de se suicider. Et cela au nom du droit à l’autodétermination !
D’un côté, nos autorités bafouent le droit à l’autodétermination, parce que fumer sa « clope » dans une chambre individuelle d’EMS est interdit. Cela pourrait mettre en danger la sécurité d’un établissement ! De l’autre, les EMS sont obligés d’accepter entre leurs murs les bénévoles d’Exit et leurs distributions de potions de mort, sous prétexte que toute personne a droit à l’autodétermination et au suicide. Ce faisant, on bafoue la liberté de conscience des directions d’EMS, hostiles à ce type d’interventions au nom de leurs convictions chrétiennes !
Pas de coexistence des opinions opposées dans un Etat pluraliste
Jeudi dernier, les « sages » du Tribunal fédéral ont supris par leur décision de contraindre l’Armée du salut à accepter Exit dans les murs de son EMS Le Foyer dans le canton de Neuchâtel. On s’attendait à une pondération fine, qui permette de faire coexister dans un Etat pluraliste des convictions diamétralement opposées sur la question de la fin de vie et de l’assistance au suicide. Mais non ! Le Tribunal fédéral, après « une pesée des intérêts », emboîte le pas des militants d’Exit, sans prendre en compte que certains EMS informent leurs hôtes au début de leur séjour du fait qu’ils sont défavorables à la pratique du suicide assisté. Sans avoir à l’esprit que les personnes qui sollicitent une assistance au suicide ont toujours la possibilité de sortir de leur EMS et de mettre fin à leurs jours à domicile ou chez des parents. Ou pourquoi pas dans des institutions gérées par Exit où on entrerait et où on saurait que, dès qu’on le souhaite, on peut « tirer la prise » comme bon nous semble !
Quel avenir pour les EMS chrétiens ?
Suite à une telle décision, que va-t-il advenir des institutions chrétiennes qui ont osé braver le raz de marée qui traverse la Suisse et qui se dit favorable à Exit ? Renoncer aux subventions cantonales, comme le suggère de manière un peu légère le Tribunal fédéral, et se lancer dans le privé ? Certains acteurs chrétiens de l’accompagnement respectueux des personnes en fin de vie le souhaiteraient. Ou alors aller au conflit et être condamné pénalement pour refus de laisser des « thuriféraires » de la mort vaquer à leurs activités morbides ? D’autres acteurs se disent prêts à aller jusque-là.
Quoi qu’il en soit, cette décision de la plus haute instance judiciaire de Suisse souligne les difficultés de nos autorités, tant judiciaires que politiques, à ternir ferme sur une des valeurs fondamentales de toute société libérale : la liberté de conscience. Une société pluraliste doit se construire en travaillant à la reconnaissance de ses diversités. Il y a de la place en Suisse pour des visions du monde différentes par rapport au début comme à la fin de la vie. Le respect de celles-ci passe aussi par la reconnaissance de différents types d’EMS, notamment ceux qui revendiquent un accompagnement sans assistance au suicide jusqu’à la fin !
Serge Carrel
Journaliste
Responsable de lafree.ch
Lire l’article : « Suicide assisté à Neuchâtel : pas d’exception pour l’Armée du salut selon le Tribunal fédéral »