La famille protestante est en deuil ! L'aîné de la famille « fait des siennes ». Il emprunte des chemins indignes de l'ethos familial protestant. Pour tout dire, il s'égare dans des chemins de traverse, qui n'ont rien à voir avec la vision « classique » du couple et de la famille.
L'Eglise évangélique réformée du canton de Vaud (EERV) pratiquera dès 2014 des célébrations pour couples partenariés (1). Après de vifs débats entre des autorités ecclésiales, plutôt libérales dans leurs convictions théologiques, et une partie de la base de sensibilité évangélique, la décision est tombée le 9 novembre à une majorité impressionnante : il y aura bel et bien des rites pour couples partenariés, même si ce ne sont pas des célébrations de mariage, nous rassure Suzette Sandoz, membre du synode (2).
En silence (3). Dans la prière. Nous avions espéré que notre grand frère ne se lancerait pas dans cette pratique. En rupture avec le donné biblique. En négation de tout ce que la tradition chrétienne a développé de plus extraordinaire sur la vie de couple. En contradiction avec ce que 95% des Eglises chrétiennes professent de par le monde...
Voilà, c'est fait ! Alors, quelles conséquences pour les évangéliques de ce coin de pays ?
Un soutien des amis évangéliques au sein de l'EERV
Tout d'abord un soutien pour les amis réformés de sensibilité évangélique qui ont plaidé contre ce rite et qui, aujourd'hui, sont profondément déçus de leur Eglise. Un encouragement aussi à continuer la lutte, parce que « les autorités ecclésiales changent, mais la Parole de Dieu demeure » !
Les bras ouverts également ! Parce que dans ce pays, il y a une autre manière de vivre l'Eglise de Jésus-Christ. Depuis la Réforme du XVIe siècle, depuis le Réveil du début du XIXe, des chrétiens protestants vivent leur foi loin de la légitimité que confère l'Etat, et fiers d'incarner l'idéal précurseur d'une Eglise indépendante de l'Etat, à cent lieues de « sacraliser » après coup certaines orientations de vie avalisées par la société.
Vive l'égalité entre Eglises !
Par ailleurs, cette décision du Synode de l'EERV devrait marquer pour nombre de membres des Eglises évangéliques une rupture dans leur perception du grand frère réformé. Très respectueux de son rôle de « ciment chrétien » de la société, ils ont tenu en veilleuse ce qui fait partie de leur ADN : la séparation de l'Eglise et de l'Etat. Face à une Eglise qui « sacralise » l'immoralité (Ro 1,27), le statu quo dans les relations Eglises-Etat en Pays de Vaud est-il encore concevable ?
Le modèle d'avenir est celui de la séparation. Celui d'une laïcité ouverte. Celui de la mise sur pied d'une véritable égalité de toutes les Eglises. Privé de la « perfusion étatique », notre grand frère sera alors certainement plus modeste dans ses projets. Il devrait aussi être plus enclin à écouter une partie importante de sa base, qui plaide et vit un christianisme attaché à la réalité du couple hétérosexuel monogame, comme projet privilégié et unique de Dieu pour la vie à deux.
Toute Eglise est libre d'adopter les règlements qu'elle souhaite, mais qu'elle ne demande pas alors à l'ensemble de la population vaudoise de soutenir sa pratique. Qu'elle sollicite ses propres membres pour son soutien !
Serge Carrel
Journaliste et formateur d'adultes (FREE)
Notes
1 Isabelle Biolley, « Les protestants célébreront des unions homos dès janvier 2014 », 24heures.ch.
2 Suzette Sandoz, « Le mariage est l'union d'un homme et d'une femme (pour l'EERV) », LesObservateurs.ch.
3 Hormis à cette occasion : Serge Carrel, « La bénédiction pour 'couples homo' mise en place par l'EERV suscite nombre de questions », lafree.ch.