Pourquoi mettez-vous en place cette nouvelle formation ?
Depuis pas mal de temps, nous accueillons à la HET-PRO des étudiants qui ne viennent que pour une année. Nous leur proposions soit de faire le « petit certificat » qui correspond à 6 mois d’étude et qui est très général, soit l’année propédeutique du Bachelor. Beaucoup d’introductions pour la suite de la formation en HET sont au programme de ce dernier. Les étudiants reçoivent donc une bonne vue d’ensemble, mais cela ne les prépare pas spécifiquement à la réalité qu’ils vont retrouver une fois qu’ils quittent la formation. Avec le Certificat en théologie et société (C.ThS), le but est d’offrir une formation d’une année, qui prépare à quelque chose de précis. En l’occurrence : une préparation au retour dans le monde séculier ou une préparation pour ceux qui veulent travailler dans un milieu interculturel avant de partir à l’étranger ou travailler en Suisse dans une culture différente.
Dans le détail, quelles sont les spécificités de cette année par rapport à l’année propédeutique ?
En plus d’une série de cours de base que suivent également les étudiants en première année de Bachelor, nous ajoutons deux éléments. D’une part une série de cours plus spécifiques : des cours qui existaient déjà en deuxième-troisième ou quelques nouveaux cours comme « Ethique économique » et toute une série de cours à choix parmi ceux qui se focalisent sur le monde séculier. Cela peut être « Théologie de la vocation », « Mission dans le monde séculier », « Evangile et culture »…
Le deuxième élément est un stage de 40 jours dans un travail séculier, en combinaison avec un accompagnement sous forme de mentorat pour que l’étudiant réfléchisse à ce qu’il pourrait mettre en pratique de sa foi dans cette réalité. Le but est vraiment de parvenir à poser un regard chrétien sur son activité professionnelle.
Et cela rejoint une préoccupation que vous abordez déjà dans votre enseignement, en tant qu’éthicien…
Effectivement, cela rejoint une préoccupation qui est la mienne depuis longtemps : Dieu est Seigneur de l’entier de l’Univers. Toute ma vie, 24 heures sur 24, devrait être conduite par l’Esprit… Essayer de montrer ce que cela peut signifier concrètement est important. Lorsque je travaille à mon guichet de banque ou dans mon cabinet, s’agit-il uniquement d’être patient en attendant le Royaume de Dieu ou ma passion pour le Royaume se traduit-elle dans des actes très concrets : faire en sorte que les gens aient du travail, nourrir celui qui a faim, aider le pauvre ?
Du point de vue du temps d’étude, qu’est-ce que cela représente ?
Il est possible de suivre cette formation à 100 pour cent, mais aussi à raison d’un jour par semaine sur quatre ans. Un étudiant pourrait continuer à travailler à 80 pour cent, tout en suivant cette formation une journée chaque semaine.
Quelles sont les professions qui pourraient particulièrement bénéficier d’une telle formation ?
Nous disposons d’une série d’outils de réflexion qui permettent de poser un regard sur chaque profession, mais la réflexion sur l’implication professionnelle de l’étudiant devra être effectuée par lui-même. Le théologien peut poser des questions au banquier, mais c’est le banquier qui devra faire son travail de réflexion. Pour l’avocat, l’agriculteur, l’ingénieur, l’informaticien, l’enseignant, le médecin… ce sera chaque fois à lui de mener sa propre réflexion à l’aide des outils que nous lui offrons.
Nous aimerions aussi offrir à chacun de ces étudiants un mentor ou un coach qui soit issu du domaine professionnel de l’étudiant.
Quel impact espérez-vous ?
Mon souhait est d’équiper des gens qui peuvent poser un regard critique sur leur profession et se positionner sur des enjeux qui y sont liés. Pas juste sur les questions traditionnelles à propos desquelles le monde chrétien intervient souvent ! Nous aimerions voir émerger des chrétiens qui participent à la construction de leur profession, dans le but d’avoir une activité professionnelle qui soit vraiment au service de la société, au service du bien commun, au sens large du terme, et alignée sur les valeurs de l’Evangile.
Beaucoup de jeunes se disent : « Si je veux faire un métier qui compte, il faut que je fasse pasteur ou missionnaire, ou alors que je fasse n’importe quoi d’autre et que je donne la dîme ! » Non, il faut que ces jeunes voient ce que Dieu veut faire au travers d’eux dans des métiers dits « séculiers » !
Lorsque je quitte l’Eglise le dimanche après le culte, je ne crois pas que le Saint-Esprit s’arrête à la porte et me dise : « A dimanche prochain ! »
Propos recueillis par Serge Carrel