« Pour les 5 dernières années de la Décennie « Vaincre la violence », nous allons continuer à mettre l’accent sur le fait que conflits et violences ne sont pas synonymes. » Hansulrich Gerber habite Tramelan dans le Jura bernois. Depuis 2 ans et demi, ce pasteur mennonite est le coordinateur international de la Décennie « Vaincre la violence » (DVV) au Conseil oecuménique des Eglises à Genève (COE). Lancée en 2001, cette démarche cherche sur 10 ans à sensibiliser les chrétiens et les Eglises à l’emprise qu’exerce la violence sur le quotidien et aux manières de sortir de la logique de la violence.
Lent au démarrage, mais...
A mi-parcours, Hansulrich Gerber dresse un bilan positif de la démarche. Certes le lancement de la Décennie a été lent à cause des hésitations des Eglises et de leurs responsables à s’engager dans un tel projet. Mais aujourd’hui, la Décennie « Vaincre la violence » a pris son rythme de croisière. « La Campagne de Carême des oeuvres d’entraide catholique et réformée de Suisse a repris ce thème cette année, explique le pasteur de Tramelan. Elle invitait à faire un geste contre la violence en achetant une rose au profit d’un projet de construction de la paix. »
Ce qui a marqué le plus Hansulrich Gerber depuis son entrée en fonction, c’est la rencontre de personnes en lutte contre la violence dans le quotidien de sociétés extraordinairement violentes. En avril dernier à Managua au Nicaragua par exemple, il était invité à une rencontre de femmes latino-américaines. A cette occasion, il a écouté les menaces de violences de tous ordres qui pesaient sur ces femmes et sur leurs enfants. « Le fait que nous proposions de mettre sur la table ces problèmes a constitué un formidable encouragement pour ces femmes », explique-t-il.
Le refus du « C’est terrible ! »
Ce qui désole le plus Hansulrich Gerber dans son engagement, c’est l’indifférence de nombre d’Eglises aux questions de violence. « Souvent on entend des gens s’exclamer : « C’est terrible ! » et placer la violence à l’extérieur d’eux-mêmes. C’est trop facile, rétorque-t-il. Nous devons nous interroger sur nos liens avec cette violence. Et ce d’autant plus que les Eglises chrétiennes ne sont pas toutes acquises à la nécessité de la non-violence ! »
Le mandat de coordinateur international de la Décennie « Vaincre la violence » au COE arrivera à échéance fin 2010. D’ici là, Hansulrich Gerber souhaite renforcer, dans l’esprit de ceux qui s’impliqueront dans la Décennie, le fait que conflit n’est pas synonyme de violence. « Le conflit, c’est quelque chose de normal dans la vie humaine, explique-t-il. Il faut apprendre à voir les conflits comme une dynamique de vie, renfermant un potentiel constructif et transformateur. » Personnellement, Hansulrich Gerber n’apprécie pas les conflits. Il aurait plutôt tendance à les fuir. « J’ai dû apprendre, admet-il, que les conflits ne menaient pas nécessairement à la violence et qu’il fallait les gérer de telle manière qu’ils prennent une dimension positive. »
Chaque année, une région ou un continent différent
La Décennie « Vaincre la violence » se focalise chaque année sur un continent particulier. L’an dernier, c’était les Etats-Unis. Cette année, c’est l’Asie, l’an prochain ce sera l’Amérique latine et en 2007 l’Europe. L’occasion chaque fois pour ce Suisse de tenter d’impliquer davantage des Eglises très différentes dans un engagement local en faveur de la paix et de la non-violence.
« En fait, j’ai deux passions dans la vie, relève Hansulrich Gerber, la non-violence et l’Eglise. » Et son engagement au COE lui permet de mener les deux de front. Nourri par l’Esprit du Christ et encouragé par l’engagement de personnes comme Martin Luther King ou Gandhi, Hansulrich Gerber considère d’abord son combat comme une lutte intérieure. Ce pasteur mennonite, issu d’une tradition religieuse pacifiste, tente de faire naître, en lui comme dans ceux qu’il rencontre, un monde de paix marqué par le coeur de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ : la réconciliation avec soi-même et les uns avec les autres.
Serge Carrel