Le coronavirus pousse le chant hors des églises ? Sur la terrasse de son appartement, May Demaurex appelle chaque chrétien, chaque chrétienne à découvrir ou redécouvrir des gestes tout simples pour exprimer leur louange et leur reconnaissance à Dieu. « Comme celui de dire merci, la main à plat, depuis la bouche, dans un mouvement ample vers le bas ; ou celui qui ouvre les bras pour accueillir ce Dieu d’éternité », dit-elle en élevant les mains avec de petits moulinets.
Des gestes qui guérissent
Cette gestuelle pour louer Dieu, la sexagénaire l’a apprise en Argentine, pendant ses premières années de mariage, d’abord par des cours d’expression corporelle. « Le corporel m’a guérie, libérée, m’a fait un bien fou ! » De retour en Suisse, elle s'est dotée d’une formation type « Margaret Morris » en plus – « que j’ai adaptée à ma sauce »; et a voulu transmettre son bagage dans des cercles chrétiens. Pendant dix ans, de 1990 à 2000, elle a ainsi enseigné la « danse de louange » au Centre de formation artistique chrétien Psalmodia, à Crissier (VD). « On était une dizaine de femmes chaque semaine, et là aussi, j’ai vécu des guérisons. Vraiment ! » Aujourd’hui, elle propose parfois des gestes dans son Eglise pendant la louange, ou accompagne par le mouvement les prédications de Pascal, son mari.
Louange enrichie
Mais comment expliquer la timidité des chrétiens face à cette expression du corps ? « L’histoire de l’Eglise nous montre que la danse a toujours été mise de côté, car associée à l’érotisme, explique Guy Barblan, directeur de Psalmodia. Or l’expression artistique permet d’amplifier le texte, la parole », estime-t-il. Bien sûr, le chant appartient à notre culture. Mais pour le directeur, les chrétiens devraient diversifier leur louange au moyen du geste, comme aussi de la peinture, avec un ou une artiste qui peint en direct pendant le culte, ou encore de la photographie, avec des photos projetées : « Ces différents apports enrichissent les moments de louange pour le bénéfice de tous », assure-t-il.
Corps, âme et esprit
Dans son appartement des hauts de Lausanne, May Demaurex prend un texte et lit : « Je loue la danse, car elle libère l’homme du poids des choses, et relie l’individu à la communauté… » Ce texte est de Saint Augustin, qui a vécu de 354 à 430. « Tout est dit, non ? », glisse celle qui est logopédiste de profession, expliquant encore que l’exercice est possible pour tous. Elle-même s’y est initiée au tout début par les psaumes : « J’en lisais un à haute voix, puis je voyais si, avec la main, je pouvais exprimer les mots que j’avais prononcés. Je me suis ensuite ouverte de plus en plus, et j’ai étendu mes mouvements. Aujourd’hui, je peux dire que l’exercice interpelle qui je suis profondément. Et qu’il me permet de m’exprimer à Dieu au moyen de mon corps, de mon âme et de mon esprit. C’est fantastique ! »
Gabrielle Desarzens