Il est Peul et chrétien. « Mon père à l’époque a été tolérant, explique-il posément. Il m’a permis d’aller à l’église en me demandant alors d’être un bon chrétien ! Mais à sa mort, la persécution a commencé pour moi. Elle a d’abord été exercée par mon oncle qui m’a ordonné d’abandonner ma foi chrétienne. » Boureima Diallo, 48 ans, habite dans le nord-est du Burkina Faso où il a fondé une église et un centre missionnaire dévolu aux Peuls, une œuvre qui rayonne loin à la ronde. « De plus en plus de gens de mon ethnie suivent les pas du Christ. Nous vivons comme une période de « récolte » actuellement très encourageante par rapport à tout ce qui a pu être semé par le passé », explique-t-il. Si son église compte quelque 120 membres, 1624 petites églises de maison (ndlr : chiffre de décembre dernier) d’une moyenne de dix personnes chacune ont été créées parmi les Peuls du Burkina Faso, qui sont des éleveurs traditionnellement nomades. « Depuis notre centre de Jam Tan, nous formons des disciples, mais offrons aussi des formations professionnelles et mettons même sur pied des soins médicaux. Car nous croyons que la foi sans les œuvres est morte ! »
Menaces et violence multiforme
A parler des différentes formes de persécution que subissent les convertis au christianisme, le pasteur évoque l’un de ses collaborateurs anciennement marabout, qui avait une grande échoppe et dont les affaires marchaient bien. « Sa communauté est d’abord venue chercher sa femme, puis tous ont cessé de venir dans sa boutique. Il a dû fermer son commerce et partir dans la ville voisine de Fada. Mais à chaque Ramadan, des proches le retrouvent et viennent faire pression sur lui pour qu’il abandonne sa foi chrétienne. » Boureima Diallo parle aussi de cet ami saisi par des djihadistes pendant quatre jours. « On a prié et jeûné pour qu’il soit libéré. C’est ce qui s’est passé ! Mais il reste menacé à cause de sa foi et on a préféré le faire sortir du pays ». Les femmes converties sont aussi particulièrement vulnérables, estime-t-il. Elles craignent notamment d’être mariées de force à des hommes musulmans. Il accueille ainsi six jeunes filles qui ont entre 17 et 19 ans dans son foyer, aux côtés de sa femme et de leurs trois enfants. « D’autres familles de l’église font de même. En tout, ce sont une trentaine de jeunes Peules chrétiennes que nous entourons. L’Eglise est devenue leur famille ! »
L’Evangile sur les ondes
Tout un travail radiophonique et télévisuel est aussi entrepris par cet homme à la stature imposante et aux multiples casquettes : « Nous sommes présents sur 24 stations radio au Burkina Faso et diffusons 30 minutes par semaine sur chacune d’elles au minimum », indique-t-il. Non sans ajouter avoir aussi un partenariat avec une télévision pour une émission originale de trente minutes hebdomadaires également. « Le tout en fulfuldé, la langue peule ! » Venu en Suisse pour parler à l’occasion de la Journée annuelle de l’ONG Portes Ouvertes en Suisse romande qui s’est tenue samedi 26 septembre, l’homme dit avoir été touché d’entendre des personnes notamment âgées prier pour les chrétiens de la ceinture sahélienne. « L’Eglise est meurtrie chez nous, mais pas mourante. Oui, il est difficile de garder la foi quand vous êtes constamment menacé. Et cela nous fragilise quand un frère ou une sœur l’abandonne. Mais je veux témoigner que comme chrétien, j’ai la vie. Et la vie en abondance. Que je peux et veux la partager. Et que je cherche en ce sens activement toutes les opportunités possibles. Merci de continuer à prier pour nous ! »
Gabrielle Desarzens